Au terme d’une épreuve de force de plus d’un an opposant démocrates et républicains sur ce siège laissé vacant par le décès du juge Antonin Scalia, le Sénat à majorité républicaine a adoubé le magistrat de 49 ans choisi par le président.

Les républicains avaient abaissé jeudi la majorité requise pour permettre ce scrutin, un changement historique des règles de la chambre haute du Congrès. Neil Gorsuch a été finalement confirmé par 54 voix contre 45.

Le président Donald Trump a félicité dans un communiqué le magistrat conservateur, en soulignant qu’il était le « choix parfait pour officier au sein de la plus haute cour de la nation ».

Le juge Gorsuch prêtera deux serments lundi. Il jurera d’abord de respecter la Constitution lors d’une cérémonie à la Cour suprême, puis de servir la Justice lors d’une cérémonie à la Maison-Blanche.

Nommé à vie

Nommé à vie, il devrait siéger dès la seconde moitié d’avril dans l’élégant édifice de marbre blanc qui fait face au bâtiment du Capitole à Washington.

On s’attend à ce qu’il se positionne nettement à la droite du collège, dont il va rajeunir la moyenne d’âge. La cour est actuellement composée de quatre magistrats conservateurs et quatre progressistes, dont trois femmes.

Il rejoint Elena Kagan (56 ans) et Sonia Sotomayor (62 ans), nommées par Barack Obama, Stephen Breyer (78 ans) et Ruth Bader Ginsburg (84 ans), nommés par Bill Clinton, John Roberts (62 ans) et Samuel Alito (67 ans), nommés par George W. Bush, Clarence Thomas (68 ans), nommé par George H.W. Bush et enfin Anthony Kennedy (80 ans), nommé par Ronald Reagan.

Promouvoir le port d’arme

Grâce à Neil Gorsuch, l’institution qui tranche les grands débats de la société américaine va s’arrimer dans le conservatisme, possiblement le temps d’une génération. Cela, au grand soulagement des religieux traditionalistes, des militants des armes à feu, des opposants à l’avortement ou encore des puissants intérêts financiers.

Concrètement, les experts s’attendent à ce que la Cour suprême tente de faire avancer la jurisprudence sur certains dossiers qui divisent fortement les Américains.

« Je pense qu’ils vont commencer à se pencher sur le sujet des armes, notamment les restrictions sur les armes portées en dehors du domicile. Avec Gorsuch, les conservateurs peuvent avoir une majorité permettant d’invalider certaines de ces restrictions », explique à l’AFP le professeur Lee Epstein, de l’université Washington à Saint Louis.

L’arrivée du juge Gorsuch était également attendue avec impatience par la Maison-Blanche, qui voit actuellement sa capacité d’action bridée par le pouvoir judiciaire.

Deux juges fédéraux ont ainsi suspendu les deux versions du décret anti-immigration de Donald Trump. Après ce double camouflet, le président américain s’est gardé d’immédiatement saisir la Cour suprême, par crainte d’être retoqué une nouvelle fois. Mais, l’instance recommençant à pencher à droite, les perspectives changent.

« Vu son importance, il est bien possible que la controverse sur le décret migratoire finisse à la Cour suprême », confirme l’expert en immigration Stephen Yale-Loehr, selon qui l’audience pourrait se tenir à l’automne plutôt qu’au printemps.

Revirement sur le décret migratoire ?

« Quand elle se prononcera, la Cour suprême pourrait bien offrir la victoire au président. La Cour suit généralement l’exécutif sur les sujets d’immigration, car l’immigration touche aux questions de souveraineté nationale et d’affaires étrangères. Cela sera d’autant plus vrai avec Neil Gorsuch », ajoute-t-il.

Depuis la mort inattendue en février 2016 du juge Antonin Scalia, un pilier conservateur, la haute cour a rendu certains arrêts sans véritable portée, à égalité quatre juges contre quatre.

Certains de ces dossiers risquent désormais de revenir devant l’instance pour être véritablement tranchés, notamment une affaire emblématique du droit du travail concernant les cotisations syndicales obligatoires.

Les neuf juges pourraient examiner d’autres dossiers sensibles, comme un programme migratoire de Barack Obama offrant des permis de séjour aux mineurs arrivés sur le territoire américain avant l’âge de 16 ans.

Ou encore des questions relatives au droit à l’avortement ou aux relations conflictuelles entre l’État et les Enlises.